Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
VDS
VDS
Publicité
Archives
VDS
Derniers commentaires
10 août 2006

LA PRESSE CHINOISE ENTEND SE SERVIR DES JO DE PEKIN POUR MARQUER DES POINTS CONTRE LA CENSURE

A deux ans de l'ouverture des Jeux olympiques de Pékin, la question de la liberté de la presse en Chine anime les débats. Pour le gouvernement chinois, l'événement est appelé à consacrer l'émergence de la Chine sur la scène internationale et sa réussite économique. Mais, avec les milliers de journalistes étrangers qui se rendront dans le pays, il risque aussi d'attirer l'attention sur toutes sortes de dossiers problématiques, et de cristalliser les revendications de ceux qui se sentent floués par le "miracle chinois".

A l'extérieur de la Chine, les défenseurs des libertés civiles entendent bien, eux, profiter des Jeux olympiques pour faire campagne et obtenir des concessions de la part du régime. Dans un communiqué de presse publié lundi 7 août, Reporters sans frontières (RSF) s'indigne de ce "qu'à 730 jours de l'ouverture des Jeux de Pékin, les autorités chinoises puissent poursuivre leur répression dans le silence quasi absolu du CIO (Comité international olympique) et des Comités olympiques nationaux... Ce silence permet aux autorités de Pékin de poursuivre sans vergogne les violations massives des droits de l'homme".

L'organisation de défense de la liberté de la presse rappelle que des journalistes ou internautes sont toujours emprisonnés (une cinquantaine, dont un Hongkongais, Ching Cheong) en Chine et fustige les règles qui restreignent l'activité des reporters étrangers, obligés de déclarer tout voyage en dehors de la province où ils résident habituellement. Elle dénonce les fermetures de sites (récemment, le forum de discussion Century Net) et une "reprise en main" des publications chinoises les plus libérales.

FINANCIÈREMENT AUTONOMES

Les deux ans à venir s'annoncent comme un véritable test pour une presse chinoise qui, à la faveur d'une commercialisation et d'une professionnalisation croissantes, a largement évolué au cours des dernières années. Loin d'être monolithiques, les médias chinois les plus aguerris défendent bec et ongles leur rôle de contre-pouvoir émergent.

Cette évolution n'est pas toujours perçue à l'étranger : en mars, le journaliste Wang Xiaofeng publiait un faux message de fermeture de son blog, un canular destiné aux agences de presse étrangères. L'idée, raconta ensuite cet observateur sarcastique du système chinois, était de faire comprendre aux étrangers que la réalité de la censure et de la répression n'était pas aussi simpliste qu'ils voulaient le croire.

Nul mieux que Li Datong, ancien rédacteur en chef de l'hebdomadaire Bingdian (Freezing Point), n'est mieux placé pour comprendre que chaque parcelle de liberté arrachée aux hiérarques du parti crée une jurisprudence salutaire. Il y a quelques mois, en diffusant sur Internet son opposition à un système secret de pénalités pour les journalistes dont les articles déplaisent au gouvernement, Li Datong sauvait la profession du pire et ridiculisait le parti. Il fut licencié, et Bingdian fermé... pour quelque temps seulement, car cela suscita un tollé dans l'opinion publique.

Dans un essai publié fin juillet dans le South China Morning Post, à Hongkong, et intitulé "De l'espoir à l'horizon", Li Datong livre un état des lieux prudent mais encourageant de la presse chinoise : il y montre combien l'idéologie n'a plus aucune prise aujourd'hui, ni sur les journalistes ni sur les censeurs. Il y explique aussi comment la plupart des médias sont financièrement autonomes et se félicite de voir des tabloïds avides d'audience oser publier des nouvelles sensibles.

"Bien qu'il n'y ait pas eu de changements dans l'actuel système de contrôle, il est devenu habituel de voir [dans la presse] une couverture extensive des désastres, des abus en matière de justice, de la poursuite par les citoyens de leurs droits, ainsi qu'une mise en question des politiques existantes du point de vue du public", ajoutait cette figure du journalisme engagé chinois.

A Pékin, en 2008, c'est peut-être bien de la presse chinoise que le Parti communiste aura le plus à craindre - et non des journalistes étrangers.

Brice Pedroletti

Article paru dans l'édition du 10.08.06

Publicité
Publicité
Commentaires
Publicité