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1 mars 2007

Les trois grands partis mexicains en crise

            

Marine Le Pen soudain candidate du Parti socialiste, ou Philippe de Villiers adoubé par les Verts : voilà des acrobaties politiques impensables en France. Au Mexique, en revanche, la principale formation de la gauche, le Parti de la révolution démocratique (PRD), a sérieusement envisagé, début février, de soutenir la candidature d'une militante de la droite catholique la plus conservatrice au poste de gouverneur de l'Etat du Yucatan, avant d'y renoncer sous la pression de sa base et d'une opinion publique outrée. Cet épisode est révélateur des difficultés des trois grands partis qui se partagent les faveurs des électeurs mexicains. Souvent considérés comme de simples franchises pour conquérir le pouvoir, ils ont du mal à définir leurs frontières.

Huit mois après l'élection présidentielle du 2 juillet 2006, aucun des trois partis ne s'est vraiment remis du plus tumultueux scrutin qu'ait jamais connu le Mexique. Ni les deux perdants : le vieux Parti de la révolution institutionnelle (PRI, centre gauche), rétrogradé à la troisième place, et le jeune PRD, dont le candidat présidentiel, Andres Manuel Lopez Obrador, n'a toujours pas accepté sa défaite ; ni même le gagnant en titre, le Parti d'action nationale (PAN, droite), tiraillé entre l'aile démocrate-chrétienne qu'incarne le président Felipe Calderon et une extrême droite en croisade contre les " dérives autoritaires " de la gauche latino-américaine.

" S'il existait des psychologues de partis, un bon investissement serait de leur payer à tous les trois une thérapie complète ", ironise le politologue Leonardo Curzio. Il voit dans la " qualité déplorable du système de partis ", trop riches, bureaucratisés et clientélistes, l'une des pires faiblesses de la démocratie mexicaine. Le plus atteint est le PRI, héritier de la révolution de 1910, au pouvoir pendant soixante et onze ans, qui avait déjà dû céder à la droite la présidence de la République, en 2000. Six ans plus tard, le candidat du PRI a convaincu moins d'un quart des votants.

Ce navire démâté, livré au bon vouloir des dix-sept gouverneurs estampillés PRI qui règnent sur des Etats parfois immenses, pense avoir évité le naufrage en portant à sa tête, le 18 février, l'une de ses figures les moins discréditées, l'énergique Beatriz Paredes. Elle semble décidée à infléchir à gauche le discours du PRI, sans compromettre l'alliance que les caciques de son parti ont offerte au président Calderon, en échange de l'impunité pour ses personnalités les plus contestées. Ni le gouverneur de l'Etat de Puebla, Mario Marin, impliqué dans un complot contre la journaliste Lydia Cacho, qui dénonce courageusement les réseaux pédophiles, ni celui de l'Etat d'Oaxaca, Ulises Ruiz Ortiz, synonyme d'autoritarisme et de corruption, ne devraient être trop inquiets.

L'une des épreuves qu'aura à affronter Beatriz Paredes sera la candidature du maire PRI de Tijuana, Jorge Hank, au poste de gouverneur de Basse-Californie, alors qu'il est soupçonné par Washington et Mexico de collusion avec les narcotrafiquants. Après le marathon de 2006 - présidentielle et législatives -, 2007 s'annonce encore comme une année électorale intense. Suivant les cas, les électeurs seront appelés à choisir leurs gouverneurs, les assemblées régionales et les conseils municipaux dans 14 Etats de la fédération (sur 32 si on compte le " district fédéral " de Mexico), dont le Michoacan, le Yucatan et Oaxaca.

Pressés par les échéances, les états-majors n'ont guère de temps pour l'introspection. Le PRD a reculé jusqu'à mi-août 2007 - après les législatives et municipales d'Oaxaca - son congrès national. " Il aurait fallu le tenir en septembre 2006, afin d'évaluer l'élection présidentielle : nous allons payer un prix pour ce retard, mais ce sera un vrai congrès d'orientation ", confie Alejandro Encinas, en qui des militants du PRD voient l'avenir d'une " gauche intelligente ", susceptible de conquérir les couches moyennes sans décevoir la base populaire du parti.

Proche de M. Lopez Obrador, qui lui avait confié la mairie de Mexico quand il s'est lancé dans la course présidentielle, M. Encinas se garde de critiquer ouvertement son mentor. Il ne dit pas, ou plus, que la courte victoire de la droite est due à une " fraude massive ", comme le faisait le PRD après le scrutin. Il défend néanmoins la décision de paralyser pendant l'été le centre de la capitale avec des campements protestataires. " Si nous n'avions pas canalisé le mécontentement, il y avait un risque de dérapages violents, affirme ce dirigeant qui a commencé à militer au Parti communiste mexicain. A l'inverse de ce que beaucoup pensent, nous nous sommes comportés de façon très responsable, car le sang n'a pas coulé. "

FÉDÉRATION DE COURANTS

M. Encinas estime qu'il faut " refonder le PRD ", qui s'est transformé en une fédération de courants, chacun avec ses propres règles, voire ses propres congrès, et privilégie les disputes internes en oubliant qu'il gouverne six Etats - dont le " district fédéral " de Mexico -, soit 26 millions de Mexicains, le quart de la population du pays.

Le courant majoritaire du PRD, " Nouvelle gauche ", a ouvert le feu contre M. Lopez Obrador et ses fidèles lors d'une réunion médiatisée, les 17 et 18 février, en leur imputant la responsabilité de la défaite subie le 2 juillet. Pourtant, cette tendance qui favorise un infléchissement social-démocrate du PRD, voit dans l'ancien candidat le seul leader capable de s'opposer au gouvernement de Felipe Calderon et refuse de " fracturer un mouvement qui nous a donné 15 millions de voix ".

Le PAN connaît également des tensions. La sensibilité démocrate-chrétienne, à laquelle appartient le président Calderon, est minoritaire dans le parti, face au groupe des entrepreneurs, tournés vers l'économie de marché, et aux idéologues du Yunque, une organisation engagée aux côtés de l'Eglise catholique. Son représentant le plus visible, Manuel Espino, actuel chef du PAN, avait décrit M. Calderon, en pleine campagne présidentielle, comme un " petit chauve avec des lunettes ".

M. Espino est aussi, jusqu'en 2009, président de l'Organisation démocrate-chrétienne en Amérique latine (ODCA), forte d'une trentaine de partis. Lors de la réunion inaugurale de son mandat, en janvier à Mexico, il a promis de " récupérer " un à un les pays du sous-continent, de la République dominicaine au Brésil, afin de damer le pion au Venezuela d'Hugo Chavez et au régime castriste à Cuba. De son côté, M. Calderon s'apprête à recevoir les visites du chef du gouvernement espagnol, José Luis Rodriguez Zapatero, et de la présidente chilienne Michelle Bachelet, qui sont tous les deux des socialistes modérés.

 

 

© Le Monde

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