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8 août 2003

PSYCHANALYSE PERVERSION SEXUELLE

i Dite sexuelle. 1

a « Un enfant est battu ». 2

b Histoire du fantasme de fustigation. 3

Un fantasme, surgi dans la prime enfance peut‑être dans des occasions fortuites et maintenu en vue de la satisfaction auto‑érotique, ne peut être conçu que comme un trait primaire de perversion. Une des composantes de la fonction sexuelle aurait devancé les autres dans le développement, se serait rendue précocement indépendante, se serait fixée et par là soustraite aux processus ultérieurs du développement, mais en donnant ainsi un témoignage de la constitution particulière et anormale de la personne. Nous savons qu’une telle perversion infantile peut ne pas persister pour la vie, qu’elle peut encore succomber plus tard au refoulement, avoir pour substitut une formation réactionnelle ou être transformée par une sublimation. Mais il se pourrait que la sublimation naisse d’un processus particulier entravé par le refoulement. Mais quand ces processus font défaut, alors la perversion se maintient dans l’âge mûr, et lorsque nous trouvons chez l’adulte une aberration sexuelle – perversion, fétichisme, inversion – nous sommes en droit de nous attendre à découvrir par anamnèse un tel événement fixateur dans l’enfance. Et bien avant la psychanalyse des observateurs comme BINET ont pu rapporter les étranges aberrations sexuelles de la maturité à des impressions de ce genre, datant précisément de la 5ème ou 6ème année de l’enfance. Assurément notre compréhension des perversions se heurtait là à une limite, car les impressions fixatrices étaient dépourvues de toute force traumatique, elles étaient la plupart du temps banales et incapables d’émouvoir les autres Individus. On ne pouvait pas dire pourquoi la tendance sexuelle s’était fixée précisément sur elles. Mais on pouvait leur trouver une signification : elles avaient fourni aux composantes sexuelles ayant pris de l’avance et prêtes à s’élancer un point d’ancrage occasionnel, et l’on devait être préparé à l’idée que la chaîne de la liaison causale trouverait quelque part une fin provisoire. La constitution innée semblait justement correspondre à toutes les exigences d’un tel point d’arrêt. Quand la composante sexuelle précocement détachée est la composante sadique nous nous attendons, sur la base de ce que nous avons appris par ailleurs, que par refoulement ultérieur de cette composante on obtiendra la disposition à la névrose obsessionnelle. On ne peut pas dire que cette attente ait été contredite par les résultats de notre enquête. Parmi les six cas sur l’étude détaillée desquels a été construite cette petite communication (quatre femmes et deux hommes) se trouvaient des cas de névrose obsessionnelle, l’un extrêmement grave, détruisant la vie du Sujet, un autre d’une gravité moyenne, bien accessible à l’influence thérapeutique, un troisième enfin qui présentait au moins quelques traits évidents de névrose obsessionnelle. Le quatrième était assurément une franche hystérie avec douleurs et inhibitions. Quant au cinquième, qui n’avait réclamé l’analyse qu’à cause de son impuissance à prendre des décisions, un diagnostic clinique grossier ne l’aurait pas classé du tout ou s’en serait débarrassé avec l’étiquette de psychasthénie. Qu’on n’aille pas apercevoir dans cette statistique quelque déception : car premièrement nous savons qu’il n’est pas nécessaire que toute disposition se développe ultérieurement en une affection, et deuxièmement nous pouvons nous contenter d’expliquer ce qui existe et sommes en droit de nous soustraire d’une manière générale au devoir de faire comprendre aussi pourquoi quelque chose n’est pas arrivé. C’est jusqu’à ce point et seulement jusqu’à ce point que nos connaissances actuelles nous laisseraient pénétrer dans la compréhension des fantasmes de fustigation. Le pressentiment que le problème n’est pas pour autant réglé vient assurément à l’esprit du médecin analyste lorsqu’il doit s’avouer que ces fantasmes demeurent la plupart du temps à l’écart du reste du contenu de la névrose et ne trouvent pas leur place propre dans la trame de celle‑ci. Mais on a coutume, comme l’enseigne l’expérience personnelle de FREUD, de volontiers passer outre à ces impressions.   

La représentation fantasmatique « un enfant est battu » est avouée avec une fréquence étonnante par des personnes qui ont demandé un traitement psychanalytique pour une hystérie ou une névrose obsessionnelle. Il est fort vraisemblable qu’elle se présente plus fréquemment encore chez d’autres personnes qui ne sont pas contraintes par une maladie manifeste à prendre cette décision. A ce fantasme sont attachés des sentiments de plaisir à cause desquels il a été d’innombrables fois reproduit ou est encore toujours reproduit. Au paroxysme de la situation représentée survient presque régulièrement une satisfaction onanistique (donc au niveau des organes génitaux), d’abord avec le consentement de la personne mais aussi bien, par la suite, avec un caractère compulsionnel et contre son gré. L’aveu de ce fantasme n’est consenti qu’avec hésitation, le souvenir de sa première apparition est incertain, une résistance sans équivoque s’oppose au traitement analytique de cet Objet, honte et sentiment de culpabilité s’émeuvent à cette occasion peut‑être avec plus de force que lors de communications semblables portant sur les premiers souvenirs de la vie sexuelle. On peut finalement s’assurer que les premiers fantasmes de cette espèce ont été cultivés très tôt, certainement avant l’âge scolaire, dès la 5ème et la 6ème année. Lorsque l’enfant a assisté à l’école à la fustigation d’autres enfants par le maître, cette expérience a réveillé ses fantasmes s’ils étaient endormis et les a renforcés s’ils étaient encore présents, tout en modifiant sensiblement leur contenu. A partir de là c’est un nombre indéterminé d’enfants qui ont été battus. L’influence de l’école a été si claire que les patients concernés étaient d’abord tentés de rapporter leurs fantasmes de fustigation exclusivement à ces impressions de la période scolaire, après la 6ème année. Mais cela ne tenait jamais, ils avaient déjà existé avant. Si la fustigation des enfants cessait dans les grandes classes, son influence trouvait plus qu’un simple substitut dans l’effet des lectures, qui prenaient bientôt de l’importance. Dans le milieu des patients de FREUD, c’étaient presque toujours les mêmes livres, accessibles à la jeunesse, dans le contenu desquels les fantasmes de fustigation allaient se chercher de nouvelles stimulations : la Bibliothèque dite rose, La case de l’oncle TOM et ouvrages du même genre. En concurrence avec ces fictions la propre activité fantasmatique de l’enfant commençait à inventer une profusion de situations et d’institutions dans lesquelles des enfants étaient battus, ou punis et châtiés d’une autre manière, parce qu’ils n’avaient pas été sages et qu’ils s’étaient mal conduits. Comme la présentations fantasmatique « un enfant est battu » était régulièrement investie avec un intense plaisir et aboutissait à un acte procurant une satisfaction auto‑érotique voluptueuse, on pouvait s’attendre que le spectacle d’un enfant battu à l’école serait lui aussi la source d’une jouissance semblable. Mais ce n’était pas le cas. Le spectacle de scènes réelles de fustigation à l’école soulevait chez l’enfant qui y assistait un sentiment particulièrement aigu, vraisemblablement mêlé, dans lequel l’aversion avait une grande part. Dans quelques cas l’expérience réelle de scènes de fustigation a été ressentie comme insupportable. Du reste même dans les fantasmes plus raffinés des années suivantes était maintenue la condition que les enfants châtiés ne subissent aucun dommage sérieux. On ne pouvait éviter de se demander quelle relation pouvait bien exister entre l’importance du fantasme de fustigation et le rôle que les châtiments corporels réels avaient joué dans l’éducation familiale de l’enfant. L’hypothèse qui se présentait la première, celle d’une relation inverse entre les deux phénomènes, fut impossible à prouver par suite du caractère unilatéral du matériel. Les personnes qui ont fourni la matière de ces analyses étaient rarement battues dans leur enfance et en tout cas elles n’avaient pas été élevées à coups de trique. Naturellement chacun de ces enfants avait pourtant eu l’occasion d’éprouver un jour ou l’autre la supériorité de la force physique de ses parents ou de ses éducateurs. Il est inutile d’insister outre mesure sur les coups que les enfants eux‑mêmes ne manquent pas d’échanger dans toute chambre d’enfants. Sur ces fantasmes précoces et simples qui ne renvoyaient pas d’une manière patente à l’influence d’impressions scolaires ou de scènes tirées de la lecture, la recherche aurait bien voulu en apprendre davantage. Qui était l’enfant battu ? L’auteur du fantasme lui‑même ou un autre enfant ? Etait‑ce toujours le même enfant ou était‑il indifférent que ce fût souvent un autre ? Qui était‑ce qui battait l’enfant ? Un adulte ? mais qui, plus précisément ? A toutes ces questions ne faisait suite aucune solution éclairante, mais toujours uniquement la même réponde timide : Je n’en sais pas plus. Un enfant est battu. Les demandes concernant le sexe de l’enfant battu avaient plus de succès, mais sans nous aider à mieux comprendre. Maintes fois il était répondu : Toujours uniquement des garçons, ou : Uniquement des filles. Plus fréquemment c’était : Je n’en sais rien, ou C’est indifférent. L’idée qu’eut le questionneur d’une relation constante entre le sexe de l’enfant auteur du fantasme et celui de l’enfant battu ne se concrétisa jamais. Une fois il y eut encore un détail caractéristique du contenu du fantasme qui se montra : le petit enfant est battu sur son tutu tout nu. 

Les fantasmes de fustigation ont un développement historique qui n’est pas du tout simple, et au cours duquel la plupart de leurs aspects sont plus d’une fois changés : leur relation à l’auteur du fantasme, leur Objet, leur contenu et leur signification. Pour suivre plus facilement ces transformations intervenant dans les fantasmes de fustigation FREUD se restreint aux personnes féminines, qui au demeurant (quatre contre deux) constituent la majeure partie des cas. Aux fantasmes de fustigation des hommes se rattache d’ailleurs un autre thème. La première phase des fantasmes de fustigation chez la fille doit donc appartenir au tout début de l’enfance. Il y a quelque chose dans ces fantasmes qui, d’une manière remarquable, demeure impossible à déterminer, comme si la chose était indifférente. La maigre réponse que l’on a obtenue des patients lors de la première communication, « un enfant est battu », paraît justifiée pour ce fantasme. Mais quelque chose d’autre est à coup sûr déterminable, et cela à toutes les fois dans le même sens. L’enfant battu n’est jamais le même que l’auteur du fantasme, c’est régulièrement un autre enfant, la plupart du temps un petit frère ou une sœur, quand il en a. Puisque cela peut être un frère ou une sœur, aucune relation constante entre le sexe de l’auteur du fantasme et celui de l’enfant battu ne peut se découvrir. Le fantasme n’est donc sûrement pas masochiste, on serait tenté de le qualifier de sadique, seulement on ne peut négliger le fait que l’enfant auteur du fantasme n’est jamais non plus lui‑même celui qui bat. On ne voit pas clairement tout d’abord qui est en réalité la personne qui bat. On peut seulement établir ceci : ce n’est pas un autre enfant, mais un adulte. Cette personne adulte et indéterminée pourra par la suite être reconnue d’une façon claire et univoque comme étant le père (de la fille). Cette première phase du fantasme de fustigation sera donc pleinement rendue par la phrase ; le père bat l’enfant. On peut se demande avec hésitation si l’on doit déjà reconnaître le caractère d’un fantasme à ce qui n’est encore que la phase préliminaire du fantasme de fustigation ultérieur. Il s’agit peut‑être plutôt de souvenirs se rapportant à des scènes qu’on a vues se dérouler, à des désirs qui sont apparus à diverses occasions, mais ces doutes n’ont aucune importance. Entre cette première phase et la phase suivante se sont accomplies de grandes transformations. La personne qui bat est bien demeurée la même, celle du père, mais l’enfant battu est devenu un autre enfant, c’est régulièrement la personne même de l’enfant auteur du fantasme, le fantasme est à un haut degré teinté de plaisir et s’est empli d’un contenu significatif dont la déduction nous occupera plus tard. Sa formulation est donc maintenant : je suis battue par le père. Il a indubitablement un caractère masochiste. Cette seconde phase est la plus importante de toutes et la plus lourde de conséquences. Mais on peut dire d’elle en un certain sens qu’elle n’a jamais eu une existence réelle. Elle n’est en aucun cas remémorée, elle n’a jamais porté son contenu jusqu’au devenir conscient. Elle est une construction de l’analyse, mais n’en est pas moins une nécessité. La troisième phase offre quant à elle une certaine ressemblance avec la première. Sa formulation est celle qui nous est connue par la communication de la patiente. La personne qui bat n’est jamais la personne du père, elle est ou bien laissée indéterminée comme dans la première phase ou bien investie, d’une manière typique, par un substitut du père (professeur). La personne propre de l’enfant auteur du fantasme ne reparaît plus dans le fantasme de fustigation. Pressées de questions les patientes répondent seulement : vraisemblablement, je regarde. Au lieu d’un seul enfant battu on a maintenant affaire la plupart du temps à beaucoup d’enfants. Dans la grande majorité des cas ce sont (dans les fantasmes des filles) des garçons qui sont battus, mais sans qu’ils individuellement connus. La situation originaire, simple et monotone, consistant à être battu, peut connaître les modifications et les enjolivements les plus variés, à la fustigation peuvent se substituer la punition et des humiliations d’une autre sorte. Mais le caractère essentiel qui différence les fantasmes même les plus simples de cette phase de ceux de la première, et qui établit la relation au fantasme intermédiaire, est le suivant : le fantasme est maintenant porteur d’une forte excitation qui sans équivoque possible est sexuelle, et en tant que tel il conduit à la satisfaction onanistique. Mais c’est justement là qu’est l’énigme : par quelle voie le fantasme désormais sadique dans lequel des garçons étrangers et inconnus sont battus est‑il devenu la possession désormais durable de l’aspiration libidinale de la petite fille ? Si l’on conduit l’analyse à travers ces toutes premières périodes dans lesquelles est logé le fantasme de fustigation et à partir desquelles il est remémoré, elle nous montre l’enfant empêtré dans les excitations de son complexe parental. La petite fille est tendrement fixée au père, qui vraisemblablement a tout fait pour gagner son amour et de cette manière dépose en elle le germe d’une attitude haine et de concurrence envers la mère, attitude qui continue à se maintenir à côté d’un courant de tendre affection, et à laquelle il peut être réservé de devenir avec les années toujours plus forte et plus clairement consciente ou de donner l’impulsion à une liaison amoureuse à la mère qui soit excessive et réactive. Mais ne n’est pas au rapport à la mère que se rattache le fantasme de fustigation. Dans la chambre d’enfants il y a aussi d’autres enfants, plus âgés ou plus jeunes de très peu d’années, qu’on n’aime pas beaucoup, pour bien des raisons, mais principalement parce qu’on doit partager avec eux l’amour des parents, et qu’à cause de cela on repousse de soi avec toute l’énergie sauvage qui est propre à la vie sentimentale de ces années. Si c’est un petit frère ou une petite sœur plus jeune (comme 3 cas sur 4) on le mérpise, non content de le haïr, et il faut pourtant qu’on supporte de voir comme il tire à lui cette part de tendresse que les parents aveuglés réservent chaque fois au plus jeune. On comprend bientôt que le fait d’être battu, même si cela ne fait pas très mal, signifie une révocation de l’amour et une humiliation. Ainsi plus d’un enfant qui se considère comme trônant en sécurité dans l’amour inébranlable de ses parents a été d’un seul coup déchu de tous les cieux de sa toute‑puissance présomptueuse. Aussi est‑ce une représentation agréable que celle du père battant cet enfant haï, tout à fait indépendamment du fait qu’on l’ait vu battre effectivement. Cela veut dire : le père n’aime pas cet autre enfant, il n’aime que moi. Tels sont le contenu et la signification du fantasme de fustigation dans sa première phase. Le fantasme satisfait ouvertement la jalousie de l’enfant et dépend de sa vie amoureuse, mais il est aussi fortement soutenu par ses intérêts égoïstes. Un doute subsiste dont : peut‑on le caractériser comme un fantasme purement sexuel ? On n’ose pas non plus l’appeler un fantasme sadique. On sait que vers l’origine tous les caractères avec lesquels nous sommes accoutumés à bâtir nos distinctions ont tendance à s’estomper. Cela ressemblerait donc à la promesse faite par les trois sorcières de BANCO (Autrement dit c’est ambigu : « Moindre que MACBETH et plus grand ! – Moins heureux, bien plus heureux pourtant ! – Tu engendreras des rois, sans être roi toi‑même ! ») : pas à coup sûr sexuel, pas même sadique, mais pourtant la matière d’où doivent sortir l’un et l’autre. Mais en aucun cas il n’y a lieu de supposer que déjà cette première phase du fantasme est au service d’une excitation qui, sous la pression des revendications génitales, apprend à obtenir la décharge dans un acte onanistique. Dans ce choix d’Objet précoce de l’amour incestueux la vie sexuelle de l’enfant atteint manifestement l’étape de l’organisation génitale. C’est plus facile à démontrer pour les garçons, mais également indubitable pour les petites filles. Quelque chose comme un pressentiment de ce que seront plus tard les buts sexuels définitifs et normaux domine l’aspiration libidinale de l’enfant. On peut à bon droit se demander avec étonnement d’où cela vient, mais on en a pour preuve que les organes génitaux ont déjà commencé à jouer leur rôle dans le processus d’excitation. Le désir d’avoir un enfant avec la mère ne manque jamais chez le garçon, le désir d’avoir un enfant du père est constant chez la fille, et cela alors qu’ils sont totalement incapables d’avoir une idée claire de la voie qui peut conduire à l’accomplissement de ces désirs. Chez l’enfant il paraît devoir être établi que les organes génitaux ont quelque chose à faire là‑dedans, même si son activité de rumination se plait à chercher l’essence de l’intimité qu’il suppose exister entre ses parents dans des relations d’une autre sorte, par exemple dans le fait de dormir ensemble, d’uriner en commun, etc., même si un tel contenu peut être mieux saisi dans des représentations de mots que l’obscure activité qui est en rapport avec les organes génitaux. Mais vient le temps où cette première floraison est gâtée par le gel. Aucune de ces amours incestueuses ne peut échapper à la fatalité du refoulement. Elles lui succombent, ou bien à l’occasion d’événements extérieurs démontrables qui ont provoqué une déception (offenses inattendues, naissance indésirable, et ressentie comme une infidélité, d’un petit frère ou d’une petite sœur), ou bien sans occasions de ce genre, pour des raisons internes, peut‑être seulement par suite de la carence de l’accomplissement après lequel on a trop longtemps langui. On ne peut méconnaître que les occasions ne sont pas les causes efficientes, mais que ces relations amoureuses sont vouées à sombrer un jour ou l’autre sans que nous en sachions la raison. La plus probable est qu’elles s’en vont parce que leur temps est révolu, parce que les enfants entrent dans une nouvelle phase de leur développement dans laquelle ils sont contraints de répéter le refoulement du choix d’Objet incestueux que leur dicte l’histoire de l’humanité, tout comme auparavant ils ont été poussés à adopter un tel choix d’Objet (voir le destin dans le mythe d’Œdipe). Ce qui comme résultat psychique des motions amoureuses incestueuses existe à l’état inconscient n’est plus pris en charge par la conscience dans la nouvelle phase, ce qui avait déjà été conscient est à nouveau poussé au‑dehors. En même temps que ce processus de refoulement apparaît une conscience de culpabilité, de la même provenance inconnue, mais sans aucun doute rattachée à ces désirs d’inceste et justifiée par leur persistance dans l’inconscient (voir le développement de ce thème du complexe d’Œdipe). Le fantasme du temps de l’amour amoureux avait dit : Il [le père] n’aime que moi, et pas l’autre enfant, car c’est ce dernier qu’il bat. La conscience de culpabilité ne sait pas trouver de plus dure punition que le renversement de ce triomphe : « Non, il ne t’aime pas, car il te bat. » Ainsi le fantasme de la seconde phase – être soi‑même battu par le père – deviendrait l’expression directe de la conscience de culpabilité, qui alors a comme base l’amour pour le père. Il est donc devenu masochiste. Il en est toujours ainsi, chaque fois la conscience de culpabilité est le facteur qui transforme le sadisme en masochisme. Mais cela n’est assurément pas tout le contenu du masochisme. La conscience de culpabilité ne peut être restée en maîtresse du terrain à elle seule. Il faut que la motion amoureuse ait elle aussi sa part. Rappelons‑nous qu’il s’agit d’enfants chez lesquels la composante sadique pouvait ressortir prématurément et isolément pour des raisons constitutionnelles. Nous n’avons pas à renoncer à ce point de vue. Chez de tels enfants un retour à l’organisation prégénitale, sadique‑anale de l’organisation sexuelle est particulièrement facilitée. Si l’organisation génitale à peine constituée est atteinte par le refoulement, la conséquence n’est pas seulement que toute représentation (Vertretung) psychique de l’amour incestueux devient ou demeure inconsciente, mais en outre que l’organisation génitale elle‑même connaît un abaissement régressif. La proposition ‘le père m’aime » était comprise au sens génital. Sous l’effet de la régression elle se change en celle‑ci : le père me bat (je suis battu par le père). Ce fait d’être battu est maintenant un composé de conscience de culpabilité et d’érotisme. Il n’est plus seulement la punition pour la relation génitale prohibée, mais aussi le substitut régressif de celle‑ci, et à cette dernière source il puise l’excitation libidinale qui lui sera inhérente et trouvera la décharge dans des actes onanistes. Mais cela est précisément l’essence du masochisme. Le fantasme de la seconde phase – être soi‑même battu par le père – demeure généralement inconscient, vraisemblablement par suite de l’intensité du refoulement. Il peut arrivé que cela soit remémoré. Un Sujet de FREUD, homme maintenant adulte avait clairement gardé en mémoire le fait qu’il avait coutume d’utiliser à des fins onanistes la représentation « être battu par la mère ». Il est vrai qu’il substitua bientôt à sa propre mère la mère de compagnons d’école ou d’autres femmes lui ressemblant de quelque manière. Il ne faut pas oublier que lors de la transformation du fantasme incestueux du garçon dans le fantasme masochiste correspondant se produit un renversement qu’on ne trouve pas dans le cas de la fille, à savoir la substitution de la passivité à l’activité, et que ce supplément de déformation peut dispenser e fantasme de demeurer inconscient par suite du refoulement. La conscience de culpabilité se serait donc contentée de la régression à la place du refoulement. Dans les cas féminins la conscience de culpabilité, peut‑être en soi plus exigeante, n’aurait été apaisée que par l’action conjuguée des deux mécanismes. Par‑dessus le fantasme masochiste de fustigation dans la moitié des cas féminins se développe une savante superstructure de rêves éveillés, très importante pour la vie des personnes en question, et à laquelle était dévolue la fonction de rendre possible le sentiment de l’excitation satisfaisante, même après le renoncement à l’acte onaniste. Il est permis au contenu « être battu par le père » de se risquer à nouveau dans la conscience si le Moi propre est rendu méconnaissable par un léger déguisement. Le héros de ces histoires est régulièrement battu par le père, plus tard seulement puni, humilité, etc. Généralement le fantasme demeure inconscient et doit d’abord être reconstruit dans l’analyse. Cela permet peut‑être de donner raison aux Sujets qui pensent se souvenir que l’onanisme est apparu chez eux plus tôt que le fantasme de fustigation de la troisième phase – dont il faudra également parler ; ce dernier ne se serait ajouté que plus tard, sans doute sous l’impression de scènes scolaires. Aussi souvent que nous avons accordé crédit à ces indications nous avons toujours été enclins à admettre que l’onanisme était tout d’abord confessé sous l’empire de fantasmes inconscients auxquels plus tard étaient substitués des fantasmes conscients. C’est comme un substitut de cette sorte que nous concevons alors le fantasme connu de la troisième phase, configuration définitive du fantasme de fustigation, dans laquelle l’enfant auteur du fantasme n’intervient plus, à la rigueur, que comme spectateur, et où le père est maintenu dans la personne d’un professeur ou de n’importe quel autre supérieur. Le fantasme, qui maintenant est semblable à celui de la première phase, semble s’être de nouveau retourné en fantasme sadique. On a l’impression que dans la phase « le père bat l’autre enfant, il n’aime que moi » l’accent est remonté sur la première partie, après que la seconde a succombé au refoulement. Mais il n’y a que la forme de ce fantasme qui soit sadique. La satisfaction qui est obtenue à partir de lui est une satisfaction masochiste. Sa signification réside en ce qu’il a pris en charge l’Investissement libidinal de l’élément refoulé, et avec lui la conscience de culpabilité qui y est attachée. Tous ces enfants indéterminés qui sont battus par le maître ne sont pourtant que des substituts de la personne propre. Ici se montre aussi pour la première fois quelque chose comme une constance du sexe chez les personnes servant au fantasme. Les enfants battus sont presque exclusivement des garçons, dans les fantasmes des garçons aussi bien que dans ceux des filles. Ce trait ne s’explique pas d’une manière intelligible par une quelconque concurrence des sexes, car alors dans les fantasmes des garçons il devrait y avoir beaucoup plus de filles battues. Il n’a rien à voir non plus avec le sexe de l’enfant haï de la première phase, mais il se réfère à un processus qui chez les filles introduit des complications. Lorsqu’elles se détournent de l’amour génital incestueux pour le père, les filles rompent le plus facilement du monde avec leur rôle féminin, donnent vie à leur complexe de virilité (VAN OPHUIJSEN), et désormais ne veulent être que des garçons. C’est pourquoi les souffre‑douleur qu’elles se donnent comme substituts sont aussi des garçons. Dans les deux cas de rêves diurnes – l’un d’eux s’élevait presque au niveau d’une poésie – les héros étaient toujours exclusivement de jeunes hommes, c’est‑à‑dire que dans ces créations les femmes n’intervenaient absolument pas, et n’y étaient admises qu’après de longues années dans des rôles secondaires.

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