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23 janvier 2007

La vilaine curiosité de Marianne

a tête penchée, le front soucieux, Marianne s'interroge gravement : c'est quoi être riche ? Une question qui lui donne la migraine. Elle sait très bien ce qu'est la pauvreté. Un seuil officiel a été fixé : si vos revenus mensuels sont inférieurs à 788 euros et que vous vivez seul(e), vous êtes pauvre. Au-delà s'ouvre une zone inconnue et pleine de dangers. La richesse, en France, est un territoire flexible. Le riche, c'est toujours l'autre, celui qui possède plus que vous. Et Marianne n'a pas de tendresse particulière pour les possédants. Ni François Hollande, premier secrétaire du Parti socialiste, qui l'a admis lors d'un débat : « Je n'aime pas les riches, j'en conviens. »

Mais où commence la richesse ? Après le happening socialiste de la semaine dernière sur la fiscalité, on en a une meilleure idée. Le riche est celui qui gagne correctement sa vie, celui qui possède son logement. A ce titre, les principaux candidats à l'élection présidentielle sont riches. A l'exception d'Arlette Laguiller, qui loue un deux-pièces en banlieue, tous ont la satisfaction de vivre chez eux ou d'être propriétaire d'une maison à la campagne, s'inscrivant déjà dans le grand rêve de Nicolas Sarkozy : « Je propose que l'on fasse de la France un pays de propriétaires parce que, lorsque l'on a accédé à la propriété, on respecte son immeuble, son quartier, son environnement... (...) »

 

En fait, les déclarations de patrimoine des candidats résument parfaitement le tropisme national : tout dans l'immobilier. Le riche est celui qui cumule son appartement de ville, sa résidence secondaire à la campagne et sa maison de vacances à la montagne ou à la mer. Cela suffit en principe à vous faire franchir la barrière symbolique de l'impôt de solidarité sur la fortune (avec un patrimoine supérieur à 760 000 euros). Le premier secrétaire du Parti socialiste a beau ne pas aimer les riches, il se retrouve ainsi à son corps défendant dans leur camp. Expérience personnelle désagréable, mais salutaire. La réflexion théorique sur la fiscalité a parfois besoin de s'appuyer sur une expérience concrète.

 

A ce titre, Lionel Jospin manquait d'expérience il y a quelques années. Trop cigale, trop flambeur. Sa déclaration de patrimoine avait rudement inquiété les riches et préoccupé les pauvres, qui se retrouvaient parfois plus riches que lui. Que déclarait le candidat socialiste, en 1995, après plus de deux décennies de dur labeur ? Une malheureuse Renault 19 cabriolet et une Peugeot 605 ! Un silence perplexe accueillit cette triste nouvelle. Marianne n'aime pas les riches, mais ne souhaite pas non plus multiplier les pauvres.

 

On commence donc à comprendre : il faut en avoir, mais pas trop. Se cantonner à l'immobilier. Refuser la Bourse. S'interdire de financer les entreprises et de leur permettre de se développer. Déclarer urbi et orbi que l'on ne connaît pas et que l'on ne veut pas connaître le marché, qu'il n'est pas question de tremper, ne serait-ce que l'ombre d'un doigt de pied, dans ce marécage libéral. Admirables candidats : certains croient nécessaire de préciser qu'ils ne possèdent « ni actions ni obligations ». Comme s'il s'agissait d'un brevet de pureté.

 

Fin 2006, Marianne a beaucoup réfléchi à la pauvreté, elle s'est inquiétée du sort des SDF, elle a suivi le combat des Enfants de don Quichotte. La voilà depuis quelques jours partiellement déniaisée sur la richesse des uns et des autres. Mais on sent bien que sa curiosité va désormais la pousser à ouvrir d'autres portes. C'est pourquoi le mot du député socialiste Arnaud Montebourg sur François Hollande - « Ségolène Royal n'a qu'un seul défaut, c'est son compagnon » - résonne comme un coup de cymbales. Marianne, c'est certain, va vouloir en savoir plus sur les relations de ce compagnon et de cette compagne.

 

Chronique

                  Laurent Greilsamer                

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