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24 février 2007

MARCHÉ DE L'ART UN ARTISTE MÉCONNU ISSU DU SURRÉALISME : Tutundjian

            

L'HISTOIRE et le marché de l'art sont souvent régis par de grandes classifications, qui laissent parfois les électrons libres sur le bord de la route. Un tel sort a frappé Léon Tutundjian (1905-1968), auquel les galeries Le Minotaure et Alain Le Gaillard consacrent une exposition jusqu'au 10 mars. Bien qu'il ait accompagné certaines révolutions esthétiques du XXe siècle, cet artiste méconnu affiche des prix raisonnables.

Né à Amassia en Asie Mineure, Tutundjian échappa au génocide arménien en embarquant pour la Grèce puis pour Venise. Installé à Paris vers 1924, il produisit ses premiers collages d'inspiration cubiste. Il y introduisait souvent des vignettes historiques, comme dans un spécimen affiché chez Le Minotaure pour 48 000 euros. Comme l'indique l'historienne Gladys Fabre dans la monographie qu'elle lui a consacrée, " l'illustration n'est pas là qu'à titre purement formel, comme les fragments de journaux, d'étiquette ou de faux bois qui testaient la réalité de la peinture ".

En 1926, Tutundjian s'orienta vers le tachisme et l'automatisme linéaire. Du mélange des deux naîtra un surréalisme abstrait. Dans le même temps, il s'est laissé séduire par l'abstraction géométrique, en participant à la création de mouvements-manifestes comme Art concret ou Abstraction-Création.

Ce créateur s'est toutefois démarqué de ses collègues en restituant une illusion de la profondeur par un système de dégradés de points. Il a aussi fabriqué des reliefs de texture grise, composés de coupelles ou de cylindres inversés. En 1932, Tutundjian prit un nouveau virage vers la figuration surréaliste, avant de renouer en 1959 avec l'abstraction.

RÉCENT DÉCOLLAGE

Pour Gladys Fabre, l'oubli dans lequel il a sombré s'explique par ses changements de cap et son refus des modes. Comme l'indique le marchand Marcel Fleiss, Tutundjian est absent de la " Bible " d'André Breton, Le Surréalisme et la peinture, et de tous les dictionnaires ayant trait à ce mouvement. Lorsqu'en 1960 l'artiste est retourné à ses premières amours, il n'a pu s'imposer auprès de la nouvelle élite de l'abstraction.

Jusqu'aux ventes d'atelier organisées de 1969 à 1987 par le commissaire-priseur Jean-Claude Robert, le travail de Tutundjian n'avait pas fait l'objet d'une vraie promotion. Il faut dire que son caractère trempé n'avait guère facilité les choses auprès des marchands. L'intérêt que le galeriste Léonce Rosenberg lui avait manifesté en 1933 fut plombé par la crise. Les prix de Tutundjian ont de fait tardé à décoller. Dans la première vente organisée en 1969 par Jean-Claude Robert, les adjudications stagnaient entre 1 000 et 2 500 euros. Lors d'un one-man- show organisé par la Galerie de France à la FIAC en 1994, les dessins plafonnaient à 2 000-3 000 euros. Ceux présentés aujourd'hui chez Le Minotaure s'échelonnent de 5 000 à 26 000 euros.

Le problème tient enfin au faible intérêt témoigné à ce jour par les musées. En 1994, l'IVAM de Valencia (Espagne) a toutefois acheté un relief pour environ 50 000 euros. Bien lui en a pris : aujourd'hui, les reliefs affichés par Le Minotaure voguent entre 160 000 et 200 000 euros.

 

Roxana Azimi

Exposition " Léon Tutundjian, Abstraction 1925-1930 ",

jusqu'au 10 mars, galerie Le Minotaure, 2, rue des Beaux-Arts, 75006 Paris. Tél. :01-43-54-62-93.

Tutundjian,

par Gladys Fabre, éditions du Regard, 1994, 175 p., 59,46 euros.

          

          

© Le Monde

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