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2 juillet 2007

VDS95 PSYKA RITES 010707

De nombreux détails rituels ne sont explicables que par les conditions qui prédominent dans la société où ils se produisent. Un des grands avantages de la théorie psychanalytique admise est qu’elle semble rendre compte d’une manière simple, concise et universelle de tous les rites d’initiation. Mais c’est là justement que pourrait résider la raison profonde et cette élégance de l’expression, certains faits ont été adaptés de force à la théorie et d’autres laissés de côté. Les observations anthropologiques faites sur le terrain sont si nombreuses qu’une vie serait nécessaire pour les évaluer.

aLa base du rite

Les rites qui affirment des événements contraires à la nature, mais ne sont pas en mesure de les expliquer, doivent rester secrets. Autrement, les participants ne pourraient arriver à se convaincre eux‑mêmes que de tels événements se sont effectivement passés. De plus, le secret protège les croyants du doute des sceptiques, ceux‑ci n’ayant pas le pouvoir d’assembler les preuves qui pourraient anéantir la croyance. Puisque les rites d’initiation servent des buts pouvant être atteints uniquement par le symbole, et non dans la réalité, la fiction doit rester cachée si les adeptes veulent jouir des bénéfices psychologiques de l’accomplissement symbolique. Le secret est donc indispensable pour que les besoins des croyants continuent d’être satisfaits. Dans certaines populations, aujourd’hui encore, des femmes sont tuées pour avoir contemplé ces rites. La méthode utilisée par la société PORO à l’égard d’une femme qui espionne les hommes montre que c’est bien la capacité qu’elle a acquise de révéler à d’autres femmes les secrets, plutôt que sa présence et son savoir, qui détruit le pouvoir de l’initiation. Cette femme ne sera pas nécessairement tuée ; il lui sera souvent permis de vivre dans la hutte d’initiation et d’observer librement les cérémonies. Mais l’initiation terminée, elle devra rester muette jusqu’à la fin de sa vie. Si elle faiblissait et parlait, même en rêve, elle serait immédiatement tuée par un membre de la société.

bDifférentes approches

BETTELHEIM pose la question suivante : a‑t‑on le droit de faire reposer une théorie du rite d’initiation sur des observations faites sur des enfants schizoïdes ou schizophrènes du 20ème siècle. Et, réciproquement, d’interpréter le comportement de ces enfants en se référant à des pratiques en usage chez des peuples sans écriture au moment de la puberté ? Un tel procédé lui paraît peu valable, il aurait plutôt le caractère d’un argumentum ad judicium. Il pense que l’ontogenèse ne répète pas simplement la phylogenèse. Il suppose que si les structures de la personnalité des peuples sans écriture étaient aussi complexes que celles de l’homme moderne, leurs défenses aussi élaborées, leurs consciences aussi raffinées et exigeantes, si l’interaction dynamique entre le Moi, le Surmoi et le Ça était aussi intriquée et leur Moi aussi bien adapté à l’affrontement ou au changement de la réalité extérieure – ils auraient développé des sociétés aussi complexes que les nôtres, bien que différentes, probablement. Leurs sociétés, cependant, sont restées restreintes et relativement inefficaces dans leurs luttes avec l’environnement extérieur. Il se pourrait qu’une des raisons en soit leur tendance à essayer de résoudre leurs problèmes par une manipulation autoplastique plutôt qu’alloplastique ; ils modifient leur corps ou leur comportement au lieu de modifier l’environnement physique. Ce sont des observations comme celle que lorsque l’enfant a appris ce qui se cache derrière le grand secret sexuel, cela peut lui donner envie d’en explorer de son propre chef beaucoup d’autres, contrairement à l’enfant primitif qui sait tout sur ce point de vue, et de là, BETTELHEIM établit des relations entre une société complexe et une structure complexe de la personnalité, comprenant des défenses psychologiques complexes et des défenses contre celles‑ci. Ces observations lui ont fait penser que, dans la société primitive, la plupart des faits essentiels sont connus de l’enfant, ce savoir sapant l’élan qui favorise le développement d’une structure de personnalité très complexe. En résumé, il croit que les enfants primitifs peuvent développer des personnalité aussi complexes que les nôtres, mais leurs conditions de vie ne leur donnent que peu de raison d’agir dans ce sens.

A l’heure actuelle, aucun de nos rituels ou presque, ne permet aux adolescents ou aux adultes de dramatiser ou de satisfaire partiellement ses désirs. Dans une société libre – ce que la nôtre aspire à être – des solutions devaient être trouvées non dans le rituel, mais par des moyens personnels respectés par la société. Toutefois aussi longtemps que nous n’offrirons pas de solution acceptable à ce problème, nous devrions au moins témoigner d’une plus grande indulgence et d’une plus grande tolérance. Si nous étions capables de prendre plus en considération le désir du garçon d’enfanter, et celui des adolescents et des adultes hommes de jouir de la vie d’une manière plus passive et détendue au lieu d’être toujours obligés de lutter et de faire l’important, il se pourrait alors que les hommes éprouvent moins d’envie et d’hostilité angoissée à l’égard des femmes. Ils ressentiraient moins, peut‑être, la nécessité de compenser ces sentiments en gardant une distance affective vis‑à‑vis des femmes et en adoptant une attitude de compétitivité agressive les uns envers les autres. Plus les hommes seraient libres de reconnaître leur désir de créer la vie et de souligner leur contribution à cet acte, moins intense serait leur besoin d’affirmer leur pouvoir par des inventions destructrices.

 Il introduit ses spéculations anthropologiques en remarquant que la vie psychique des races dites sauvages et demi‑sauvages « présente pour nous un intérêt particulier, car nous pouvons reconnaître dans leur vie psychique, un stade précoce bien préservé de notre développement ». FREUD, dans Totem et Tabou, poursuit en disant que « la comparaison de la psychologie des peuples primitifs et celle des névrosés […] fait apparaître de nombreux traits communs », il se réfère alors aux hypothèses heuristiquement valables de la psychologie comparée.

Il a dit, sans faire de réserves, que la culture australienne est autoplastique (sans toutefois appliqué ce concept à la circoncision).

cTypologie 

De ses sept sacrements, cinq au moins, sinon six proviennent de rituels. Le baptême, qui est un renaissance rituelle ; la confirmation et l’ordre peut‑être qui trouvent un équivalent dans l’initiation proprement dite et dans l’admission au sein des sociétés religieuses secrètes qui, souvent, suit l’initiation ; la communion, le repas pris en commun qui symbolise le rituel (sinon le Dieu), intervient aussi fréquemment dans l’initiation. Enfin les épreuves imposées aux initiés, dont plusieurs sont douloureuses et humiliantes, peuvent être comparées au sacrement de la pénitence. Ainsi deux seulement parmi les sept sacrements ne sont pas concernés : le mariage et l’extrême‑onction ; encore notera‑t‑on que, dans de nombreuses tribus, l’initiation confère le droit au mariage. Pendant un certain temps, la processus de la civilisation semble s’être ainsi développé parallèlement à la division d’un rituel unique en parties constitutives – et à leur disjonction temporelle.

Ses enfants acceptent la souffrance afin de s’assurer l’entrée dans la société des adultes, lesquels, imaginaient‑ils, jouissaient en toute liberté des plaisirs sexuels. Cette attitude rendit leur entreprise fonctionnellement équivalente à un rite d’initiation, puisque les anthropologues, comme les psychanalystes, pensent que la douleur de l’initiation est le prix à payé par les adolescents pour leur accession aux prérogatives de l’âge adulte. Mais les différences entre les motivations connues des enfants et celles attribuées aux peuples sans écriture par la théorie psychanalytique étaient aussi très marquées. La théorie affirme que la circoncision à la puberté est imposée par les images du père castrateur à ses fils rebelles pour les forcer à la soumission et, en particulier, à la soumission sexuelle. Chez nos enfants, au contraire, ce furent les filles, non les garçons qui élaborèrent les plans et c’est la crainte que les garçons avaient de leurs mères toutes‑puissantes (non de leurs pères), qui parut importante dans leur acceptation des propositions des filles. Si une castration symbolique devait être organisée, elle le serait par les femmes. De plus, les garçons étaient réceptifs aux idées des filles ; le but et le résultat attendu n’étaient aucunement la soumission aux demandes parentales. Les enfants savaient que leurs parents – et BETTELHEIM qui, à l’ECOLE, était d’une certaine manière le substitut des parents – étaient opposés à leur rituel et à leur désir d’obtenir des satisfactions sexuelles dans un monde de plaisir et de promiscuité. Par l’intermédiaire du rite, ils espéraient défier les exigences d’adultes – non de perdre ou céder le pouvoir de leur résister. Tout comme les psychanalystes qui ont étudié les rites de puberté, BETTELHEIM tout d’abord particulièrement impressionné par cette partie de leur plan qui comprenait le saignement des organes génitaux, c’est‑à‑dire une opération s’apparentant à la circoncision, sinon à la castration. Sa tâche fut facilitée du fait que quatre enfants, et certainement les deux garçons, souffraient d’une angoisse de castration (accompagnée de nombreuses autres angoisses, préoccupations et délire). Toutefois, BETTELHEIM avait vécu avec ces enfants pendant plusieurs années et étudié les motivations sous‑jacentes de leur comportement. En se fondant sur ce qu’il savait d’eux, il lui apparut indubitable que leur projet avait jailli spontanément avec l’apparition de la menstruation chez les filles. Le comportement qui en était résulté envers l’angoisse de castration était entièrement différent de leurs méthodes habituelles. Ainsi, encore et toujours, la compréhension restait bloquée. L’élégance de la théorie de l’initiation et son acceptation générale (tout au moins par les psychanalystes) l’incitaient à chercher une explication sur cette base. Mais, ce faisant, BETTELHEIM se surprit à négliger quelques faits, déformant, légèrement mais sûrement, certaines facettes qu’il connaissait bien du comportement des enfants en expliquant les événements en accord avec la théorie, au lieu d’utiliser son expérience pour éprouver sa validité. En résumé, BETTELHEIM tenta d’arracher la compréhension à la théorie au lieu de la découvrir dans les faits.

Les rites d’initiation, à la fois des garçons et des filles, serviraient à promouvoir et à symboliser une pleine acceptation du rôle sexuel que prescrit la société. Un des buts des rites d’initiation masculine serait de prétendre que les hommes, eux aussi, peuvent enfanter. Par la subincision, les hommes tentent d’acquérir un appareil sexuel équivalent à celui des femmes et aussi les mêmes fonctions sexuelles. La circoncision pourrait être une tentative de prouver la maturité sexuelle, ou être une mutilation instituée par les femmes, ou encore les deux choses à la fois. Le mystère qui enveloppe les rites d’initiation masculine servirait à déguiser le fait que le but désiré n’est pas atteint. La circoncision féminine pourrait résulter en partie de l’ambivalence des hommes à l’égard des fonctions sexuelles féminines et être, en partie, une réaction à la circoncision masculine. Il pense que les rites de puberté des filles sont plus affectés par l’attitude des hommes devant la menstruation que par l’événement physiologique lui‑même. Il suggère que les sentiments des hommes se modèlent en partie à partir de la réaction des femmes. Et, complète sa pensée en déclarant que les filles ne peuvent s’empêcher d’être impressionnées par la crainte qu’ont les hommes de la menstruation. Si un événement est tabou et mystérieux pour une partie de la population, l’autre partie ne tarde pas à se poser des questions relatives à cet événement même si, au début, elle l’admettait comme un fait établi. En fin de compte, il comporte peu de savoir qui, le premier, a manifesté une réaction de crainte.

Il faut situer le type de relation qui unit contes et rites initiatiques : il semble important de rappeler qu'il n'est pas évident que le conte, plus récent et plus pérenne que les cérémonies d'initiation, qui se sont progressivement amoindries pour disparaître presque entièrement aujourd'hui, soit simplement une trace affaiblie de la réalité des rites concernés. C'est même plutôt improbable : s'il y a peut-être une connivence remontant à l'époque où ces deux expressions étaient synchrones, elle serait plutôt à chercher dans une communauté de propos que dans une retranscription littérale de l'une par l'autre. Il est plus facile d'imaginer que le conte ait été raconté de façon parallèle, avant, pendant ou après le rite (et ait perduré ainsi après le déclin de ce dernier), afin de lui donner une épaisseur significative supplémentaire, plutôt que de postuler qu'il en ait simplement servi de compte-rendu. Si cela semble évident, il est parfois difficile de ne pas l'oublier quand on mène une étude a posteriori, comme c'est le cas ici - c'est‑à‑dire lorsque l'on tente de retrouver les éléments propres à l'initiation dans le contenu du conte.

On rencontre de manière récurrente deux étapes bien définies.

La première séquence est celle du rite de marge : l'enfant est dans un premier temps isolé (comme la retraite avant la communion), puis soumis à une épreuve souvent traumatisante où sa mort est mise en scène.

La seconde séquence est celle du rite d'agrégation : il renaît à la vie, sous une forme différente, différenciée et reconnue, et est intégré dans la communauté des adultes.

Si l'on se penche maintenant sur la séquence de fonctions que PROPP a mises en évidence, on retrouve en partie cette progression : éloignement de l'enfant (ß ou ?) ; épreuve (H ou M), pas toujours réussie la première fois, qui peut alors s'accompagner d'un temps de latence, d'une mort symbolique ; retour, et reconnaissance dans le monde des adultes au travers du mariage le plus souvent (W), de la richesse parfois. Les similitudes entre les deux séries sont évidentes : isolation, épreuve et mort, retour et reconnaissance s'enchaînent de façon presque identique. Seule la mort symbolique ne semble pas aussi systématique dans les contes qu'elle ne l'est dans les cérémonies - mais à cela, en plus de la variété plus grande que l'on peut trouver dans la formulation orale, il faut opposer la difficulté de lecture de ces états de " mort symbolique ".

Si elle est en effet évidente dans le cas de Blanche Neige ou de la Belle au bois Dormant, elle est souvent plus discrète dans beaucoup d'autres histoires. Ainsi le Chaperon Rouge est-il avalé par le loup, et avant sa libération par le chasseur reste-t-il en dehors du monde des vivants - des agissants. On se souviendra aussi de l'histoire de Tom Pouce, tour à tour avalé par une vache, puis par un loup. Ces exemples nous renvoient à une particularité des rites de marge : l'enfant est avalé, ou plutôt entre dans cet Autre Monde par ingestion, par la gueule béante d'un monstrueux animal. Une fois dans cet ailleurs, il est plus facile pour nous de retrouver quelques particularités presque géographiques qui permettent la reconnaissance de cet Autre Monde dans le cadre retravaillé des contes. L'une de ses caractéristiques tient donc à la proximité des formes animales de dévoration ; en poussant un peu plus loin, on peut se demander si des textes, comme Peau d'Ane, ne sont pas une illustration diminuée de ce trait - puisqu'on y trouve aussi un ensevelissement dans l'animal, dans sa fourrure.

 

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